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TAUX / FINANCEMENT

Refus de prêt, les professionnels du courtage disent Stop !

Samuel Regan-Asante

Le 1er octobre, les taux d'usure pour les prêts immobiliers ont augmenté, apportant une bouffée d'oxygène au marché de la transaction. Beaucoup d'emprunteurs en effet, même solvables, se trouvaient alors dans l'impossibilité de souscrire à un prêt. Pour autant, leur situation va-t-elle s'améliorer ? Pas si sûr. Pour les aider, Cafpi, leader du marché des courtiers en crédits, a lancé le site « refus de prêt » ; tandis que d'autres, telle l'Union des intermédiaires de crédits (UIC), dénoncent le déni de la Banque de France.

« Je souhaitais acheter un appartement pour notre résidence principale. Je voulais emprunter 311 000 € sur 25 ans. J'ai des revenus autour de 43 125 € avec un apport de 30 000 €. Je ne parviens pas à trouver de financement. » Et puis : « Je souhaitais acheter un appartement pour un investissement locatif. Je voulais emprunter 200 000 € sur 20 ans. J'ai des revenus autour de 70 000 € avec un apport de 10 000 €. Je ne parviens pas à trouver de financement, la banque n'a rien voulu savoir. Nous avons déjà 9 biens, dont 2 intégralement payés. Qui peut aujourd'hui se faire financer ? » Sur le site refusdepret.fr, lancé par Cafpi à la fin du mois de septembre, les témoignages se multiplient. Son objectif : donner la parole à ceux dont les projets ne parviennent pas à aboutir pour de multiples raisons, et plus particulièrement, dans le contexte actuel, à ceux dont la demande de crédit a été refusée en raison du mode de calcul déficient du taux d'usure. « L'idée que des candidats acquéreurs solvables soient empêchés d'avancer dans leur vie m'était insupportable. J'ai donc eu l'idée de créer un site dédié qui leur permettrait d'explorer les solutions alternatives pour financer leurs projets ou, à défaut, d'interpeller les pouvoirs publics, notamment leurs députés, en partageant leur témoignage », explique Olivier Lendrevie, président de CAFPI.

Effet d'oxygène ou nouveau risque d'étouffement ?

Depuis quelques semaines, le taux d'usure a augmenté - passant à 3,05 % pour un emprunt de 20 ans et plus, et à 3,03 %, pour les prêts d'une durée inférieure - afin de s'adapter plus rapidement à l'évolution des conditions de marché. Est-ce à dire que les retoqués du crédit pourront plus facilement accéder à l'emprunt ? Les professionnels de l'immobilier sont unanimes, la réponse est non. « Cela a ramené un peu d'oxygène, mais on va rapidement se diriger vers les mêmes niveaux de tension qu'en septembre, déplore Olivier Lendrevie. Les banques ont procédé à une remontée des taux d'intérêt de l'ordre de 0,30 à 0,40 %. L'effet positif de l'augmentation du taux d'usure sera dès lors de courte durée : certains emprunteurs seront de nouveau pénalisés du fait de l'écart trop faible entre taux d'intérêt et taux d'usure, c'est mécanique. » Les courtiers, d'ailleurs, ne sont pas les seuls à s'inquiéter de la situation : agents immobiliers, notaires et collectivités territoriales - voyant leurs finances en danger du fait des moindres rentrées des droits de mutation - commencent aussi à tirer la sonnette d'alarme.

Pour un rafraîchissement mensuel

Face à ce nouveau risque de blocage, que faut-il espérer ou revendiquer ? Dans les colonnes du Midi Libre, Bérengère Dubus, secrétaire générale de l'UIC 1, qui reproche à la Banque de France son déni, insiste : « Nous souhaitons aujourd'hui que nos propositions constructives pour les mois qui arrivent soient entendues (...), à savoir la rehausse mensuelle de l'usure.2» Même revendication du côté de Cafpi : « Le gouverneur de la banque de France a un pouvoir de dérogation, rappelle Olivier Lendrevie. Il peut décider de refixer le niveau du taux d'usure à un niveau plus adapté durant huit trimestres consécutifs. Il s'y oppose fermement afin, nous dit-il, de ne pas aggraver les effets de l'inflation. Pour nous, la seule voie possible est donc parlementaire : nous demandons la révision du mode de calcul pour parvenir à un rafraîchissement mensuel. Cela règlerait 90 % des dossiers. Nous demandons aussi à ce que l'assurance emprunteur soit exclue du mécanisme de calcul, son coût dépendant uniquement de paramètres individuels. Enfin, comme il existe toute une palette de taux d'usure - pour les crédits à la consommation, les découverts. - on pourrait en abaisser certains pour lutter contre le surendettement tout en remontant celui qui concerne le crédit immobilier. »
1. Union des intermédiaires de crédit
2. «Taux d’usure : les courtiers accusent la Banque de France de ne pas respecter ses engagements», Karim Maoudj, 11/10/2022, Midi Libre

Photo | Samuel Regan-Asante

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