ALERTE
La renonciation du consommateur à invoquer une nullité affectant son contrat
L'exécution volontaire du contrat par un consommateur en connaissance des vices formels affectant le bon de commande vaut confirmation du contrat et renonciation à se prévaloir de ces vices
Vincent Walker
Vincent Walker
Un contentieux abondant s'est développé en matière de vente d'installations photovoltaïques, de nombreux particuliers cherchant à se désengager, après coup, déçus par la rentabilité de leur investissement. Dans l'affaire tranchée par la Cour de cassation (9 Dec. 2020, n° 18-25.686), l'acquéreur d'un kit photovoltaïque ayant constaté que ses ventes d'électricité ne couvraient pas les mensualités de remboursement du prêt qu'il avait contracté, contrairement aux dires du démarcheur qui lui avait fait espérer un autofinancement de l'équipement, demandait aux juges de prononcer la nullité du contrat de vente.
Pour cela, il invoquait l'absence de mention sur le bon de commande de certaines informations exigées, à peine de nullité du contrat, par l'article L. 121-23 du code de la consommation (dans sa version antérieure à la loi 2014-344 du 17 mars 2014) et notamment celles relatives : - à la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ; -aux conditions d'exécution du contrat (modalités et délais de livraison des biens ou d'exécution de la prestation de service).
Cet article L. 121-23, abrogé par la loi du 17 mars 2014, a été remplacé par les articles L. 221-5 et suivants du Code de la consommation, mais le point demeure le même. La société qui l'avait démarché, affirmait pour sa part que l'acquéreur avait renoncé à se prévaloir des vices qui entachaient le bon de commande - le défaut des mentions obligatoires - en exécutant le contrat pendant près de deux ans à compter de la mise en service de l'installation, en connaissance de cause de l'absence de mention de ces informations sur le bon de commande. La Cour d'appel de Paris a retenu l'argumentation du démarcheur. Tout d'abord elle énonçait que le défaut de mentions obligatoires dans le contrat est une cause de nullité relative, et non une nullité absolue (article 1180 du code civil). Or une nullité absolue ne peut être couverte par la confirmation du contrat, contrairement à une nullité relative. Apres avoir rappelé que l'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation, c'est-à-dire renonciation à se prévaloir de cette nullité (article 1182 du code civil), la Cour d'appel retenait qu'en l'espèce l'acquéreur ne pouvait ignorer les vices entachant le bon de commande (car l'existence de l'obligation légale prescrivant ces informations avait été portée à sa connaissance avant la signature du contrat). Elle jugeait en conséquence qu'il ne pouvait plus se prévaloir de la nullité, ayant poursuivi l'exécution du contrat sans d'ailleurs avoir formulé aucune réserve à la réception des travaux. L'acquéreur a formée alors un pourvoi devant la Cour de cassation. Selon lui, la reproduction du texte même de l'article L. 121-23 dans son intégralité au verso du bon de commande n'était pas de nature à permettre aux juges d'appel de caractériser sa connaissance de l'existence d'une cause de nullité du contrat induite précisément par l'absence de mention des informations prescrites par cet article. Mais la Cour de cassation rejette le pourvoi de l'acquéreur, considérant que la cour d'appel a pu déduire que l'acquéreur avait exécuté volontairement le contrat (pendant deux ans.), en connaissance des vices formels affectant le bon de commande, ce qui valait confirmation du contrat et le privait ainsi de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles invoquées. La même solution aurait-t-elle été retenue si l'acquéreur n'avait exécuté le contrat que quelques jours ou semaines avant d'engager une action en nullité du contrat ? La Cour d'appel aurait-elle pu caractériser aussi aisément son acceptation du vice ? Moralité : l'obligation d'information du vendeur posée par l'article L. 221-5 qui est censée protéger le consommateur peut se retourner contre lui quand seul le texte in abstracto de cet article est reproduit sur le bon de commande . sans les informations dues in concreto. Les consommateurs se doivent donc non seulement de lire attentivement les clauses de leur contrat, mais aussi de tirer sans délai les conséquences d'une information incomplète en les dénonçant à leur cocontractant.
Photo | Vincent Walker
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