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OPINION

Le déséquilibre inéluctable de nos territoires

Début Juin, l'Assemblée Nationale a voté à main levée l'assouplissement de la mesure concernant la limitation de vitesse à 80 km/h sur les axes secondaires de notre réseau routier.

En réalité il s'agit de donner la possibilité aux présidents de conseils départementaux et aux maires de déroger à cette limitation entrée en vigueur en juillet 2018, et de revenir à 90km/h. 48 départements ont ainsi manifesté leur intention de revenir aux 90km/h.

4 autres, la Loire Atlantique, le Rhône, le Gard et les Ardennes, arguant de sécurité et du coût d'un retour en arrière, ont pour leur part décidé de conserver la limitation à 80km/h. Au-delà des choix des uns et des autres et de leurs motivations respectives, faut-il voir dans ce vote auquel ont participé les députés LREM, une volonté du gouvernement de redonner du pouvoir aux territoires ?

Pour aller plus loin, et contrairement à un certain nombre de décisions centralisatrices du chef de l'Etat, faut-il envisager que la décentralisation ne demeure pas un vain mot, et que nos régions puissent mieux prendre des initiatives nuançant la vision souvent perçue comme technocratique de nos élites ?

Les politiques successives du logement ainsi que l'héritage d'un territoire aménagé dans les Trente Glorieuses, sont en particulier à l'origine des écarts de plus en plus grands de croissance de la population entre nos villes : Doublement de la population dans nos 12 métropoles, augmentation de 50% dans les banlieues et baisse la population en milieu rural. Mais dès 1947, Jean-François Gravier, dans son rapport « Paris et le désert français », dénonçait les principaux déséquilibres du territoire national : « une France industrielle à l'est, agricole à l'ouest et un exode rural qui déjà vide les campagnes pour remplir les villes ». S'en sont suivis des actions de déconcentration industrielle, la création de villes nouvelles, d'aéroports, d'autoroutes, et la première ligne TGV Paris-Lyon en 1980. Malgré les lois de décentralisation de 1982, certains déserts ruraux s'accentuent dans la « diagonale du vide » (de la Meuse aux Landes).

A ce jour, nos 35 millions de logements se trouvent essentiellement dans les métropoles, sur la façade atlantique, ou le bassin méditerranéen. Nos concitoyens rêvent toujours d'être propriétaires (58% le sont), d'une maison individuelle (56%), alors que le coût du foncier ne cesse de croitre. Résultat, la distorsion des prix qui grimpent encore d'un côté et baissent de l'autre.

Les critiques visent dès lors indifféremment les politiques de zonage, la fiscalité du foncier, les avantages fiscaux attribués au neuf voire le droit de propriété. Dans le cadre du Grand Débat National, la FNAIM vient de faire plusieurs propositions courageuses pour le logement dont : - la suppression de la politique de zonage qui a accentué le déséquilibre des territoires, en confortant les zones tendues au détriment du reste du territoire - la création d'agences de l'urbanisme de bassin pour équilibrer les aménagements et la politique foncière.

Pour d'autres c'est la fiscalité du foncier qui doit être repensée. Le propriétaire de terrain est-il un acteur économique ? Il ne génère que peu d'impôts (taxe sur le non bâti souvent faible). Il ne supporte que peu de charges, de travaux, de vétusté, de frais d'entretien, mais bénéficie d'une forte plus-value potentielle grâce à une éventuelle décision municipale. Fort de ce constat, beaucoup considèrent qu'il faudrait inverser la fiscalité sur les plus-values des terrains en fiscalisant de façon progressive la rétention dans le temps d'un tènement devenu constructible, alors qu'elle est dégressive à ce jour. Cela permettrait d'inciter les propriétaires de foncier à mettre plus rapidement sur le marché des terrains constructibles. Le constat est fait que la proportion du coût du foncier dans le prix de revient d'une construction d'immeuble passe de 10% dans les zones très détendues à 50% dans les zones les plus tendues.

L'incidence est directe pour l'acquéreur de son logement neuf. Ceci explique également les pistes de réflexion envisageant la dissociation du foncier dans le montage d'une opération en le faisant porter financièrement par une société adhoc. Il est même possible de concevoir des immeubles ou seul le droit de jouissance serait vendu et non le droit de propriété. C'est le cas en Angleterre. Pour autant, l'exemple londonien laisse à réfléchir vu le niveau atteint par les prix. Au Japon, où la concentration urbaine se renforce, les terres agricoles sont tombées en déshérence, et les pouvoirs publics ne connaissent même pas les propriétaires tellement désintéressés par la perte de valeur de leurs biens. Devant cette escalade, comment nos pouvoirs publics vont-ils pouvoir favoriser la revitalisation de nos centres bourgs ? Même si l'intention est louable, les dispositifs Pinel ou Denormandie restent des pansements sur des jambes de bois. La densification de construction dans nos métropoles est inéluctable. Alors donnons au moins un pouvoir consultatif plus pertinent à nos régions sur des politiques de zonage fines et plus en adéquations avec les bassins d'activité économiques.

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