Logo Expression

OPINION

Logement social ou logement public ?

Le logement représente le premier poste budgétaire mensuel pour les ménages. Le logement fait partie des trois préoccupations principales de nos concitoyens après la santé et l'emploi. Le sujet est d'importance et la confusion n'aide pas à la compréhension.

Tout le monde croit pouvoir parler du logement en parlant pompeusement d'immobilier. C'est ainsi que la plupart des usagers utilisent les mots à mauvais escient, en confondant par exemple très souvent le dépôt de garantie (somme versée par le locataire) et la caution (personne qui se porte caution). Lorsqu'un professionnel évoque « celui qui loue un appartement », parle-t-il de celui qui donne à bail (le bailleur) ou de celui qui prend à bail (le locataire) ? Mais notre culture nous a également trop souvent habitué à classer les secteurs par opposition. Maison-appartement, individuel-collectif, propriétaire-locataire, rural-urbain. Dans toutes les branches d'activité, comparaison est faite entre le secteur privé et le secteur public. Nos enfants sont inscrits dans des écoles publiques ou des écoles privées. Nous nous soignons soit à l'hôpital public, soit en clinique privée. Nous utilisons des transports publics ou des modes de transport privés. Nos juristes sont orientés dès la deuxième année en publicistes ou « privatistes ». Même le secteur bancaire reconnaît les banques publiques (BPI) et les banques privées.

Seul le logement échapperait- il au distinguo ? Pire il est de coutume d'évoquer le « logement social » face à « l'immobilier privé ».

Alors voilà la question : doit-on parler de logement social par rapport au logement privé ? La réalité économique est tout autre. Faut-il rappeler que la France compte quelque 35 millions de logements (34,8M à fin 2017 chiffres LABEL Fnaim). Sur les 11,4 millions de ménages locataires, 6,5 millions occupent un logement dans le parc privé, et 4,9 millions un logement dit « social ». 4,9 sur 34,8 : le ratio est parlant, 14% de nos ménages sont logés dans des logements « aidés ». Alors que près de 7 ménages sur 10 ont des revenus inférieurs au seuil qui permet d'avoir accès à ce type de logement. Résultat en zone urbaine les plus pauvres sont souvent logés dans le parc dit « privé » qui joue donc en réalité un rôle social.

Sans compter les logements privés des propriétaires-bailleurs qui ont signé une convention avec l'ANAH et sont loués à des niveaux de loyers sociaux. Cohérence ? La preuve est ici faite que le parc privé joue de fait un rôle social important. Certains comme l'IFRAP (Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques) dénoncent une politique couteuse à l'efficacité douteuse (dossier Le point de juin 2016). Les tensions entre les 700 organismes HLM issus de catégories différentes (les offices publics, les ESH, les coopératives, Sacicap, et les associations régionales) comme cela a été constaté au dernier congrès de l'USH (Union Sociale pour l'Habitat) de Marseille le 10 octobre dernier, rendent la tâche difficile au Président Jean Louis Dumont, dont il faut saluer le travail, pour négocier un accord avec le gouvernement qui souhaite plus d'efficience. Les offices publics qui s'étaient d'abord opposés fortement au projet du gouvernement, ont ensuite rejoint un front commun dans l'intérêt du secteur. Pour autant, il s'agit bien là de fonds publics. Et certains ne s'interdisent pas de commercialiser des logements en secteur libre. En concurrence avec les acteurs du privé ! Par ailleurs en 25 ans à Paris, le parc privé locatif a été divisé par deux, et le parc locatif social multiplié par 1,8.

Résultats les tensions sont de plus en plus grandes en secteur tendu (Paris, grandes métropoles essentiellement) avec un manque crucial de logements, alors qu'il y a de plus en plus de logements vacants dans les villes petites ou moyennes (6,4% du parc en 2007 contre 8,3% en 2017) source Insee SDES. Est-il normal dans les zones à faibles besoins que des organismes HLM commercialisent leurs logements sur le site Leboncoin ? Ces grandes distorsions géographiques prouvent que les objectifs identiques de construction sur tout le territoire (25% loi SRU) n'ont plus de sens. Ne faut-il pas recentrer l'utilisation des fonds publics vers son objet d'origine ? Ne faut-il pas appeler logements sociaux ceux qui sont occupés par les plus démunis et qui bénéficient naturellement d'aides, quel que soit l'historique du bien ? Admettra-t-on enfin que le logement est « social » de par son occupant, plus que par son financement. Car enfin, les locataires ne cherchent pas un logement « HLM » ou « privé » (secteur libre), ils cherchent un logement qui rentre dans leur budget. Peu importe pour eux que la construction ait bénéficié de TVA réduite ou d'exonération d'impôts. Le logement deviendrait social du fait de la qualité de son occupant, comme dans d'autres pays d'Europe ! En conclusion il serait bon de parler plus précisément de logement public ou privé et de logement social ou libre. Le débat y gagnerait en clarté.

© 2024 acheter-louer.fr, Toute reproduction même partielle est strictement interdite

#Logement

#Privé

#Public

#Social

#Libre

Partagez :

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée