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ANALYSE

Faut-il avoir peur du grand méchant Web 3.0

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Le Web 2.0 se voulait participatif, social et communautaire. Le Web 3.0 se veut personnalisable, mobile, connecté et au service de l'internaute. Applications diverses et variées fleurissent donc sur la toile, et force est de constater qu'une (r)évolution est en marche, notamment dans le secteur de l'immobilier. Plateforme notariale, site de coaching, observation des données énergétiques... ces nouveaux outils condamnent-ils nécessairement le secteur à l'ubérisation ou lui permettront-ils, au contraire, d'évoluer ?

Dans notre dernier numéro (NDRL : Expression N°55), nous revenions sur le lancement de la plateforme My Notary permettant de dématérialiser la signature du compromis de vente et la mise en relation des parties-prenantes. Elle n'est pas la seule à afficher sa vocation de facilitatrice de démarches, et l'immobilier est à l'honneur chez les start-up. Parmi les dernières innovations, on remarque par exemple Locat'me. On pourrait comparer ce site au Meetic de l'immobilier : il propose aux propriétaires de diffuser leur offre et d'accéder gratuitement à une liste de candidats à la location. Comme un site de rencontres, Locat'me calcule le degré de compatibilité entre les uns et les autres. Du côté des professionnels, la plateforme et le concept interrogent. « Pour nous, professionnels, nous n'oserions pas agir comme ces sites de profiling de locataires, commente Jean-Marc Torrollion, président délégué de la FNAIM. Pour pouvoir déposer un dossier, les locataires doivent quasiment justifier leur e-réputation. De notre côté, nous ne pouvons pas refuser quelqu'un sous prétexte qu'il a une mauvaise réputation sur Internet. Nous avons déontologiquement une obligation de transparence en étudiant toutes les candidatures. Sur ces sites, les critères de sélection sont totalement subjectifs... la question de la légalité peut donc se poser. »

Trouver la valeur ajoutée

Autre nouveauté, Comment vendre seul.com qui propose de « coacher » les particuliers souhaitant vendre leur bien - mais ignorant tout du savoir-faire des professionnels - grâce à des guides, des articles ou des tutoriels afin de les accompagner dans leur démarche, leur apprendre à prendre des photos ou à rédiger une annonce dans les règles de l'art. Basé sur un modèle gratuit/payant, il peut aussi prendre en charge la gestion d'appels d'acheteurs potentiels ou la diffusion des annonces sur des sites réservés à la profession. « Aujourd'hui, le marché de la transaction est fortement intermédié, constate Jean-Marc Torrollion. Pour ces plateformes gratuites ou peu chères, l'enjeu est donc de capter des particuliers qui ne souhaitent pas passer par une agence immobilière, notamment pour des raisons économiques. On peut légitimement s'inquiéter de l'existence de telles applications. Pour ma part, je crois que la présence physique d'un professionnel dans la relation acquéreur-vendeur a sa raison d'être et trouvera, face à ce type de concurrence, sa valeur ajoutée. Dans n'importe quel secteur, l'ubérisation est intervenue au moment où la valeur ajoutée ne se justifiait plus au regard du client. » A contrario, les plateformes techniques comme My Notary ou les sites d'observation énergétiques comme Openenergy ou Smart Impulse peuvent, eux, se révéler de véritables alliés pour la profession. Certains réseaux – Nexity ou la FNAIM - ont d'ailleurs passé le pas en créant des supports techniques de rédaction des contrats ou de gestion des syndics de copropriété. Désormais, les nouvelles technologies permettent même d'effectuer des visites virtuelles – intégrant par exemple une assistance au home-staging - publiables sur leurs sites. « Ces technologies offrent une qualité de services encore plus exceptionnelle, indique Jean-Marc Torrollion. Elles transforment notre manière de travailler en comprenant mieux les attentes de nos clients. »

Enjeux pour demain

Pour les métiers de l'immobilier, tout l'enjeu – face à ces concurrents numériques et pour bloquer une ubérisation galopante – consiste donc à savoir évoluer et à exploiter ces précieuses données clientèles. Une piste, proposée par Thomas Lefebvre dans sa thèse « Une nouvelle ère pour l'intermédiation en immobilier résidentiel : fondements, digitalisation et limites » publiée en 2015, consisterait à ne plus limiter la rémunération de l'agent immobilier à la réussite de sa mission d'entremise mais à permettre une structuration de l'agence autour de l'expertise de ces collaborateurs sur un ensemble de services facturables : expertise technique du bien, recherche de crédit, services de déménagement, rédaction des actes, assistances techniques. Encore faudrait-il que la législation le permette. « La profession a les moyens, si elle s'organise, de répondre à ces innovations, souligne Jean-Marc Torrollion. Mais il faut qu'on nous libère d'un carcan législatif trop contraignant afin d'être libre de proposer nos services. »

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