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POINT DE VUE

LE MARCHÉ IMMOBILIER EUROPÉEN VU PAR FRANÇOIS GAGNON

Au-delà de sa casquette franco-canadienne, François Gagnon bénéficie également d'une expertise internationale. Président du réseau ERA France et ERA Europe, il est une figure du secteur immobilier.Actuellement en France pour la préparation de la prochaine convention ERA, qui se tiendra début février à Paris, il nous fait partager ses points de vue au travers des différents marchés européens.L'occasion aussi de nous exposer les projets et horizons qu'il souhaite ouvrir en 2014 pour son réseau.Interview.

La stabilité du marché immobilier en Europe a été mise à mal durant l'année 2013. Cette crise a-t-elle impactéle réseau ERA ?Les développements prévusont-ils eu lieu ?

En ce qui concerne le développement on avait espéré que l'économie redémarre un peu plus en 2013 et que cette reprise soit plus significative et plus prononcée.

La bonne nouvelle c'est que la chute s'est arrêtée et la mauvaise nouvelle, à l'échelle européenne, réside dans le fait que les investisseurs restent encore frileux et attentistes. Côté réseau, la Slovaquie a rejoint ERA et c'est une bonne chose.

Autre bonne nouvelle, aucun pays n'a quitté le réseau ERA en 2013 et certains ont même augmenté leur chiffre d'affaires, contrairement aux années précédentes; en 2011 et 2012 les partenaires de certains états européens avaient mis fin à leur activités, atteints de plein fouet par la crise.

Cette crise, que vous évoquez,est-elle ressentie sur les marchés immobiliers européensde la même manièrequ'en France ?

Si je peux me permettre, je souhaiterais revenir sur la définition du mot crise afin d'y apporter certaines nuances qui me semblent primordiales. On entend tellement parler de "crise immobilière". La distinction que j'y ferais c'est qu'une crise, par définition, est un événement ponctuel. On ne peut pas avoir une crise qui dure 50 ans.

Différents pays européens, ont effectivement traversé une crise, telle que la Suède par exemple où les prix immobiliers ont baissé de 5 à 10 %. Puis le marché est reparti dans l'année qui a suivi. En 2013, la Suède est revenue au niveau de 2010. Dans ce cas, on peut, à juste titre, parler de « crise ».

En revanche, je ne suis pas convaincu que la France connaisse actuellement une crise. Je dirais plutôt que la hausse des prix, totalement hors contrôle, ne pouvait pas continuer à être soutenue à terme et qu'il était cohérent qu'une correction intervienne. Un ajustement du marché, un peu brutal, a été provoqué par la conjoncture économique, s'ajoutant à l'impact de la crise des subprimes survenue aux USA.

La flambée du marché, affichant des prix élevés, ne pouvait plus être soutenue. Ce contexte est, à mon sens, la raison majeure de ce qui est arrivé en France. Aujourd'hui, ce qui se produit, c'est que nous revenons à la norme.

En France, on comptait, les meilleures années, entre 800 et 825 000 transactions. En 2013 nous serons plutôt aux alentours de 700 000 ventes. Ce n'est pas une catastrophe ! Nous sommes revenus à la normalité et vue sous cet angle, l'ambiance anxiogène liée à la notion de crise, qui n'en est pas une, s'estompe fortement.

Quid des conséquencessur les agences ?

On constate, particulièrement en France, que les agences qui ont des méthodes de travail rigoureuses, du professionnalisme et qui ont mis des moyens en place pour former leurs collaborateurs, réussissent toujours sur le terrain. Celles-ci ont d'ailleurs augmenté leurs résultats en 2013 par rapport à 2012.

Par contre, les agences qui s'étaient ouvertes, sans technique et sans méthodes, pendant cette période d'augmentations élevées des prix, n'ont pas survécu, par manque de compétences et d'efficacité lorsqu'il a fallu être plus performant pour aller chercher les acquéreurs et les vendeurs.

La situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui, et que je n'aime pas qualifier de crise, va probablement perdurer encore pendant plusieurs années. Il faut donc oublier les années faciles et se concentrer de nouveau sur le professionnalisme et les méthodes que nous avons l'obligation de mettre en place et de maintenir pour nos clients.

Côté européen, quel est l'étatdu marché ? Peut-on direque l'Irlande et l'Espagne traversent les mêmes difficultés que la France, par exemple ?

Ces pays sont encore très touchés. Mais à chacun son contexte. Le cas de l'Irlande est intéressant à analyser sur le plan économique, même si humainement parlant il est catastrophique. L'Irlande avait l'ambition de devenir la plaque tournante du business européen en offrant des conditions particulièrement attractives aux sociétés voulant s'implanter sur son territoire. L'Irlande a donc connu une croissance fulgurante et le marché du bâtiment a largement bénéficié de cette politique pendant ces années fastes. Compte tenu de l'insuffisance de main d'oeuvre locale qualifiée, la Bulgarie était devenue, en Irlande, le principal pourvoyeur de main d'oeuvre d'origine étrangère. Un pic a été atteint en 2009, portant le nombre de familles bulgares résidant sur le sol irlandais à 350 000. Quand la crise a frappé, ce pays a du faire face à un exode massif de cette population étrangère vers leur pays d'origine, vers Dubaï ou encore Abou Dhabi. L'Irlande a donc été durement frappée, dans un laps de temps très court. L'économie de ce pays n'est pas encore guérie et notre réseau a d'ailleurs disparu de ce pays européen.

Le cas de l'Espagne est également catastrophique. La surconstruction est le problème majeur de ce pays après avoir été un très fort moteur de sa croissance. Cette source de développement externe, était mal contrôlée car provoquée par des investisseurs étrangers originaires principalement du Royaume-Uni. L'industrie du bâtiment voulant répondre à cette forte demande, la construction de masse s'est fortement développée. Pléthorique et mal géré, le stock de biens immobiliers peine, encore aujourd'hui, à être absorbé par la demande locale.

Pour en revenir au réseau ERA, quelles sont vos stratégiesde communication en Francepour 2014 ?

En plus des moyens traditionnels, ERA va continuer à utiliser les réseaux sociaux car ces moyens de communication portent ses fruits. Ils font, aujourd'hui, partie de notre culture et de notre fonctionnement quotidien. Par exemple, ERA est le réseau immobilier français qui compte le plus grand nombre de visiteurs sur sa page Facebook.

Ainsi, nous comptons actuellement plus de 28 000 "fans" sur notre page Facebook. (source : site Immobilier 2.0). Ces pages nous permettent de communiquer différemment avec nos clients mais aussi d'instaurer une proximité qui n'existe que peu ou pas du tout sur d'autres supports de communication, tels que la télévision ou les magazines. Autre intérêt majeur des réseaux sociaux : échanger et partager sur des sujets connexes à l'achat immobilier comme la décoration, les travaux... Le travail d'une agence étant principalement basé sur le relationnel, l'impact des réseaux sociaux y est important.

D'autres outils ont également été mis en place au sein de notre réseau en 2013, avec pour objectif de privilégier de plus en plus le numérique. Une nouvelle application pour iPhone est disponible sur l'Apple Store. Une seconde, à destination des Androïd et téléchargeable sur Google Play, permet de visualiser et de localiser les biens.

Un mot pour conclure sur l'actualité politique française visant le secteur immobilier

Pour résumer, il nous semble que Cécile Duflot a une piètre opinion du marché immobilier qu'elle considère comme un « marché aux puces ». Selon elle, les professionnels gagnent trop d'argent et sont trop souvent malhonnêtes. Dans un esprit fédérateur, Jean-François Buet est le bon président de la FNAIM, au bon moment, pour défendre les intérêts de la profession et dialoguer avec la ministre du Logement. Compte tenu de la situation économique de la France il est vital de redynamiser les entreprises françaises qui sont le moteur de la croissance. Nous ne pouvons pas nous permettre d'être embourbés dans l'idéologie et la technocratie. Il nous faut tout à la fois résorber plus efficacement nos déficits et permettre de développer la consommation et la croissance. Bien entendu, l'exercice est et restera encore difficile pendant plusieurs années.

Mais il est certain que ce n'est pas en adoptant une ligne politique consistant essentiellement à taper sur les riches et les mauvais propriétaires qu'on développera la consommation et la croissance. Cette politique, ni réfléchie ni adaptée, définie unilatéralement au mépris des conséquences sur le terrain, est désastreuse. Heureusement, suite aux pressions exercées par la profession, Cécile Duflot a fini par amender son texte sur les trois sujets qui fâchaient.

Il serait bon que cette politique de tâtonnement et d'absence de concertation réelle, cesse afin de nous laisser, nous les professionnels de l'immobilier, travailler en paix, en coopération entre tous les acteurs, après avoir été brutalement déstabilisés tout au long de 2013.

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