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ENQUÊTE

Banques : un nouveau positionnement sur le marché immobilier

C'est un fait avéré, face à la crise, les banques ont dû revoir leur stratégie sur le marché immobilier. L'année 2012 a connu une baisse spectaculaire des taux d'emprunt, qui ont atteint, en décembre dernier, leur plus bas niveau historique. 93,7 % des emprunts immobiliers souscrits en novembre 2012 l'ont été à un taux inférieur à 4 %. Toutefois les acquisitions ne se multiplient pas pour autant : si les banques proposent des décotes très favorables, c'est uniquement pour les emprunteurs présentant de faibles risques et disposant d'un apport personnel conséquent.

Les conséquences de la baisse du pouvoir d'achat sont palpables dans toute l'Europe et l'immobilier se retrouve parmi les secteurs concernés. Le volume du crédit habitation a chuté de plus de 24 % au troisième trimestre 2012. Et la baisse sur l'année a atteint 33,1 % par rapport à 2011. Dès lors, en retard sur leurs objectifs annuels, les banques mènent une politique de baisse des taux pour conquérir de nouveaux clients. Les taux fixes ont baissé en moyenne de 0,7 point au cours de l'année écoulée, en partie en raison de la baisse de 1 point du taux de l'OAT 10 – qui, en décembre, s'est retrouvé lui aussi à son plus bas niveau historique. Et fin 2012, les taux de crédit immobilier ont encore baissé, avec des variations comprises entre -0.05 % et - 0,10 %. Il n'a jamais été aussi intéressant d'emprunter : en moyenne dans l'Hexagone, le taux de crédit immobilier sur 20 ans s'est abaissé jusqu'à 3,23 %, les meilleurs profils pouvant bénéficier d'un taux proche des 3 %, soit un taux moyen inférieur au précédent record de 3,25 % établi en novembre 2010. Cette baisse concerne l'ensemble du marché, aussi bien dans l'ancien, qui est passé de 3,97 % en février à 3,23 % en décembre, que dans le neuf, qui sur la même période a reculé de 3,93 % à 3,22 %. C'est le pourcentage le plus bas pratiqué par les banques sur le marché immobilier depuis 1945. Dans ce contexte, la renégociation se révèle une option intéressante notamment pour les propriétaires ayant souscrit un crédit dans les années 2008 et 2009 où les taux étaient bien plus élevés. Et les courtiers le confirment : les renégociations de prêts affluent.

Un avantage à double tranchant

Mais si les décotes sont inédites, les demandes de crédit ne remontent pas pour autant. Selon certains observateurs, obtenir un prêt intéressant et une telle décote est en réalité très laborieux. Ils notent que les banques se montrent malgré tout plus sélectives et que si les taux baissent, les conditions de revenus et d'apport se durcissent. Les nouvelles exigences réglementaires de ratio de fonds propres imposées par la réforme Bâle 3 contraindraient les établissements financiers à réduire la durée des emprunts qu'ils accordent et à prêter plus cher. La part d'apport personnel exigée au moment de l'acquisition serait, de ce fait, plus forte, et la demande de crédits, déjà faible, en pâtirait d'autant plus. Certes, rapatrier de l'épargne ou des assurances sécurise les banques et permet d'obtenir des décotes supplémentaires : plus grand est le capital de base apporté par l'emprunteur,et plus rapidement il est en mesure de rembourser son emprunt, plus sûre sera la décote. Le montant de l'apport moyen a doublé en sept ans, s'établissant à 50 465 € - un record si l'on se souvient que dans les années 1990 - cette somme correspondait au prix d'un studio à Paris. Et cette somme augmente sans exception dans toutes les régions, générant actuellement un phénomène de transfert de l'assurance- vie vers l'immobilier, n'étant pas rare que les banquiers demandent 20 à 30 % d'apport personnel.

Le profil de l'acquéreur

Dès lors le portrait type de l'acquéreur-emprunteur en France révèle un secundo-accédant disposant d'un apport lié à une précédente vente, avec des revenus élevés. Sans surprise, le marché immobilier se transforme et les primo-accédants comme les jeunes acheteurs, dont le premier achat s'effectue souvent avec un apport financier limité, se font plus rares. La part des primoaccédants est passée en un an de presque 40 % de la production totale à moins de 20 %. Corrélativement, la durée moyenne des crédits est en baisse à 20 ans contre 20 ans et 9 mois en 2011, conséquence logique quand on sait que les banques privilégient les secundo-accédants. Les prêts sur une durée courte sont plus facilement octroyés et s'accompagnent de plus grandes décotes. A Strasbourg, en décembre 2012, il était possible d'obtenir un crédit à 2,40 % sur 15 ans, 2,75 % sur 20 ans et même 3,10 % sur 25 ans – sous condition de revenus et d'apport. Selon le courtier Cafpi, en 2010, le taux record avait été de 2,90 % sur 15 ans. Il est intéressant de noter que grâce à ce niveau record des taux, toujours en décembre 2012, les emprunteurs ont vu leur pouvoir d'achat immobilier augmenter dans plusieurs grandes villes françaises. À Strasbourg toujours, pour 1 000 € de mensualité sur 20 ans, on a pu emprunter 184 445 € contre 165 022 € en janvier, et acheter ainsi une petite pièce supplémentaire.

Les raisons de l'attentisme

Mais les exigences liées aux transactions parisiennes influent de manière notable sur la moyenne, et ne reflètent pas la situation nationale pour autant. Ailleurs, compte tenu du contexte économique dégradé, emprunteurs et établissements financiers ont également fait preuve d'une plus grande prudence afin de minimiser les risques – conséquence logique sur le marché immobilier de la hausse du chômage au niveau national. Mais contrairement à l'Ile-de-France, où le phénomène de durcissement des critères d'octroi est bien réel, en région les conditions bancaires sont restées plutôt stables au deuxième semestre 2012. En réalité, la diminution des transactions immobilières trouverait ses causes dans les inquiétudes des particuliers sur le pouvoir d'achat, conjuguées à la disparition du Prêt à Taux Zéro pour l'acquisition dans l'ancien et surtout aux prix très élevés qui ne semblent pas près de baisser de façon significative ... En effet, bien plus que le taux, c'est le prix qui est déterminant dans tout achat immobilier. Côté gouvernement, les dernières mesures ont été portées sur les évolutions du Prêt à Taux Zéro Plus qui visent à soutenir les primo-accédants à revenus modestes dans l'acquisition ou la construction d'un logement neuf.

Stratégie bancaire

Pour revenir aux banques, la question d'un manque d'offres bancaires à l'origine de la baisse des transactions immobilières, thèse avancée par certains observateurs, s'était également posée. Mais elle se voit contrariée par le mouvement même de baisse des taux, en effet rendu possible principalement par la faiblesse des taux d'intérêts souverains. Le rendement des obligations d'Etat françaises à 10 ans a baissé tout au long de l'année et est même passé sous la barre des 2 % début décembre, permettant aux banques de reconstituer leur marge en maintenant des taux bas, et laissant penser que les taux tendraient vers une stabilisation. En octobre 2012, selon les grands courtiers, 63 % des banques ont laissé inchangés leurs taux de crédit immobilier. Si le mouvement de baisse a repris en novembre, ce n'est que le reflet de la volonté de certaines banques, qui jusqu'ici ne suivaient pas la tendance générale, de rattraper le niveau des établissements les mieux placés. L'harmonisation des grilles tarifaires des banques observée en novembre et décembre serait donc un préalable à une stabilisation durable des taux. Car en effet, le mouvement global de baisse n'a qu'un potentiel limité et les banques n'auraient pas grand intérêt à descendre plus bas. On attend désormais de savoir si les prix de l'immobilier, qui ont légèrement baissé dans certaines régions, vont eux aussi suivre la tendance.

Banques

Le moment peut paraître idéal pour renégocier un prêt immobilier, mais en y regardant de plus près, peu d'opérations sont réellement intéressantes. Le montant emprunté, la différence de taux, l'ancienneté du prêt et les frais de gestion sont à prendre en compte. Pour être rentable, l'écart doit être sensiblement important entre les deux taux et le crédit souscrit il y a moins de cinq ans - les intérêts étant remboursés dans les premières années. Ainsi, selon la simulation du courtier CAFPI, l'emprunteur qui aurait souscrit un crédit de 220 000 € en septembre 2008 à un taux de 5,5 % sur une durée de 25 ans, et qui l'aurait renégocié en mai 2012, obtiendrait un gain de 64 726 € en conservant le même niveau de mensualité. S'il choisissait de diminuer sa mensualité, son gain serait de 36 662 €. En revanche, pour un emprunteur qui aurait souscrit un prêt de 100 000 € en janvier 2011 à un taux de 3,8 % et sur une durée de 15 ans, l'économie réalisée ne permettrait pas de rentrer dans les frais : il diminuerait le coût de son crédit de 1 991 € s'il conservait le même niveau de mensualité et de 1 581 € s'il le diminuait. Ajoutons que la plupart du temps, la banque prêteuse est peu encline à renégocier, l'opération étant peu profitable de son point de vue.

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