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POINT DE VUE

Coworking immobilier : un concept audacieux

Le groupe Digit RE a inauguré le 16 mai dernier le premier coworkimmo au coeur de Lyon, espace collaboratif pour les professionnels de l'immobilier. Bien sûr, le concept a été pensé pour que les deux enseignes d'agents commerciaux indépendants dont Digit RE est l'actionnaire de référence, Capifrance et OptimHome, dotent leurs conseillers d'un lieu pour travailler, recevoir, rencontrer. Il est néanmoins beaucoup plus large, puisque l'adresse est accessible à tous les acteurs de l'immobilier qui le souhaitent, moyennant une très faible contrepartie financière.

Les deux objectifs méritent qu'on s'y attarde, parce qu'ils marquent des évolutions étonnantes au pays de l'immobilier. Tout d'abord, voilà que deux importants réseaux dématérialisés d'agents mandataires, c'est-à-dire de négociateurs non salariés exerçant sous une même enseigne et partageant des moyens professionnels et commerciaux, font un pas vers l'univers matériel. Certes, le directeur général de Digit RE, par ailleurs dirigeant de Capifrance et d'OptimHome, a eu soin de préciser qu'il ne s'agissait pas de recréer une agence immobilière qui porterait un autre nom. On pourrait voir dans cette nuance une précaution oratoire, histoire qu'on n'imagine pas que son groupe est en train de faire machine arrière sur le virtuel... Non, Olivier Colcombet, devenu une figure de l'univers des réseaux de transaction, n'a pas besoin de dire que le modèle qu'il incarne marche bien. On crédite les réseaux de l'ordre de 15% des parts du marché professionel, acquises en quelque quinze ans en France. Bref, la probabilité que ce Coworkimmo soit le signe d'un remords stratégique est très faible et on peut l'écarter.
En revanche, on aurait pu imaginer que les réseaux aient bel et bien voulu recréer une boutique, utilisée comme une super agence régionale, pour représenter les marques que sont Capifrance et OptimHome, à l'instar de ces enseignes populaires de la vente par correspondance qui ont ouvert des magasins dans les villes significatives. Là les achats pouvaient s'effectuer selon les méthodes traditionnelles, histoire de redonner des repères et des repaires aux clients. Si tel était le cas, les réseaux considèreraient que les ménages pensent l'acte de transaction immobilière en référence aux pratiques traditionnelles et qu'il faut se mettre dans leur logique. Or, tout porte à croire qu'il n'en est rien : le modèle professionnel des réseaux d'agents commerciaux, qui est aussi un modèle économique, plaît à ceux qui y recourent pour de vraies raisons intrinsèques. Ainsi, la disponibilité et le nomadisme des travailleurs indépendants conviennent aux moeurs du moment. Convient aussi l'absence d'agence pour ceux qui, réfractaires à l'idée de passer par une structure professionnelle, veulent une démarche ressentie comme moins contraignante, moins intrusive en un sens, moins engageante. «J'ai eu affaire à un conseiller, je n'ai pas fait le choix d'une agence.» Sans parler de la question des honoraires: ceux des agents indépendants sont en moyenne inférieurs de 20% à ceux des agences, précisément parce que leurs charges de structure sont moindres.

Alors que sont pour les agents commerciaux de réseaux ces espaces de coworking, c'est-à-dire ces lieux participatifs? Ils leur permettent de disposer pour un coût très faible, facturé à l'usage occasionnel ou sous forme d'abonnement mensuel, d'un bureau pour accueillir leurs clients, ce qui leur apporte un confort de travail et les institutionnalise aussi. C'est également un endroit où rencontrer ses pairs, se comparer, se situer quant aux performances. La solitude du négociateur et du commercial en général est un cancer. Elle induit les questions, qui mènent aux doutes, aux états d'âme et bientôt à la perte d'efficacité. Le coworking, c'est le partage dans le respect de l'indépendance. C'est aussi la chance de l'irrigation intellectuelle. Digit RE a prévu que des «master class» -des témoignages de figures emblématiquess'y déroulent, des conférences, des formations, sachant que tous ces apports peuvent se faire de façon distantielle, mais que la richesse des échanges physiques exige des lieux et des moments de rencontre réelle. Et puis ce Coworkimmo lyonnais, premier du genre, a vocation à recevoir l'ensemble des acteurs professionnels de la transaction, diagnostiqueurs, architectes, décorateurs, notaires, voire agents immobiliers concurrents ou partenaires des négociateurs des enseignes. Il fallait oser imaginer que ce lieu pourrait devenir une sorte de maison commune de l'immobilier. Il fallait du cran parce que la communauté immobilière vit plutôt dans la désunion que dans la solidarité, et qu'il est évident que son salut viendra de la solidarité. Oui, il fallait un lieu décomplexé où faire se rencontrer les parties prenantes à la vente immobilière et un acteur du digital était le mieux placé pour accomplir cette mission. C'est sans nul doute le progrès le plus marquant apporté par ce coworkimmo, espace collectif immobilier. Il reste à voir si le succès sera au rendez-vous et si la communauté immobilière mesurera d'emblée et sans arrière-pensée combien le concept renouvelle l'image des professionnels immobiliers.

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